Le royaume du Benin a été l'un des rares grands royaume d'Afrique de l'Ouest côtière à avoir atteint une taille importante en dehors de l'influence de l'Islam, et avant tout contact avec les Européens. Son territoire correspond au sud-ouest de l'actuel Nigeria. Et même, sur une carte hollandaise de 1705, réimprimée en 1907 par sir Alfred Jones, le pays noté grand Benin correspond à la partie du Nigeria située au sud-ouest du fleuve Niger, du Bénin actuel et d'une partie du Togo.
Les origines
La création du royaume date du
XIIIe siècle. La genèse est incertaine, mais certains écrits traditionnels racontent que les habitants d'Edo ont invité le prince Oranmiyan du royaume
Yoruba voisin de
Ife pour les protéger de la tyrannie des Ogisos. D'autres versions prétendent que le prince Oranmiyan a dirigé une invasion qui a rejeté les Ogisos qui dirigeaient la région depuis
-355. Il est généralement admis qu'Eweka, le fils d'Oranmiyan, fut le premier
Oba (roi) du Benin.
Dans les premières étapes de l'émergence du royaume, le pouvoir restait au concile des chefs, le Uzama, avec le Oba à leur tête. Sous le règne du Oba Owedo, à la fin du XIIIe siècle le pouvoir commence à passer plus fermement dans les mains du Oba.
En Europe, il était connu avant le XVe siècle qu'au-delà du Maghreb, les Arabes obtenaient de l'or de peuplades noires.
L'âge d'or
L'âge d'or du royaume du Benin commence avec Oba Ewuare, dit le grand, qui régna de 1440 à 1473. Il commence par renforcer son pouvoir en créant d'autres catégories de chefs pour affaiblir le pouvoir du Uzama, et contrer les factions politiques. Il débute une série de conquêtes : Idah vers le nord, Owo et Akure en pays Ibo, à l'ouest du Niger. Le royaume devient un empire, et Benin City, qu'il fait fortifier, en est la métropole. Le Oba a désormais une nature semi-divine, et Ewuare institue l'hérédité du titre.
C'est à la fin du règne d'Ewuare, en 1472, que Ruy de Sequeira, un navigateur portugais, établit un premier contact avec le royaume du Benin. Cependant, ce contact est sujet à controverse chez les historiens.
Le fils d'Ewuare, Ozolua le conquérant, poursuit l'extension de l'empire. Lagos devient une ville de garnison pour les troupes. En 1486, un autre navigateur portugais, Joao Affonso d'Aviero, entre en contact avec le royaume et des échanges d'ambassadeurs entre les deux pays vont s'établir, ainsi que des échanges commerciaux : le Benin envoie du Poivre, des peaux de léopards, de l'Ivoire, des vêtements traditionnels, des objets artisanaux de bois et de terre cuite. En échange, ils reçoivent vêtements, lunettes... et surtout des armes à feu qui favorisent le pouvoir militaire et accélère encore l'expansion pendant tout le XVIe siècle. Les missionnaires portugais avaient comme instructions de convertir le Oba au Catholicisme, mais la position de celui-ci en tant que chef du culte de son peuple fait échouer ce projet.
C'est avec le fils d'Ozolua, Oba Esigie, qui règne de 1504 à 1550, que le royaume atteint son apogée, surtout dans le domaine des arts et de la culture. Des explorateurs anglais ont rapporté que Esigie pouvait lever une armée de vingt mille hommes dans la journée, et jusqu'à cent mille hommes si nécessaire. Esigie crée aussi le titre de reine mère pour fêter sa mère Idia; les plus anciennes têtes de reine en laiton, un des chefs d'oeuvre de l'art beninois, datent de cette époque.
Esigie, dans un effort pour diffuser le Christianisme auprès de son peuple envoie Ohen-Okun, le prêtre de Ughoton, comme ambassadeur auprès du roi du Portugal en échange de missionnaires catholiques, les deux rois échangent de nombreux cadeaux précieux. Esigie autorise aussi la construction d'églises dans les villes de Ogbelaka, Idumwerie et Akpakpava. L'église Aruosa de Benin City est une survivance de cette époque.
La première expédition britannique au Benin date de 1553. Rapidement des échanges commerciaux s'établissent, notamment d'ivoire, d'Huile de palme et de poivre, puis plus tard d'esclaves, des prisonniers de guerre vendus par les Béninois. Ce marché deviendra tellement florissant que les côtes du Benin seront appelées côtes des esclaves.
Le déclin
En
1702, le Hollandais David Van Nyendal décrit le régime alimentaire typique du royaume à la fin de son âge d'or, à base de boeuf, mouton et poulet. L'influence du royaume diminue au
XVIIIe siècle sous la poussée des Yorubas à l'ouest, des Britanniques au sud et des Nupes au nord. Cependant, elle reprend de l'essor au
XIXe siècle avec le commerce de l'huile de palme.
La destruction
Dans les
Années 1880 et
1890, la pression des Britanniques se fait plus forte. Pour préserver l'indépendance du royaume, le Oba restreint petit à petit les exportations jusqu'à ce que celles-ci ne se fassent plus qu'en huile de palme.
En 1897, le lieutenant Phillips demande un rendez-vous au Oba Ovoramwen pour signer un traité demandant l'arrêt de la traite des esclaves et des sacrifices humains. Il se rend à Benin City avec un détachement de neuf hommes, alors qu'il n'a pas encore reçu de réponse. Cette venue est prise comme un acte de guerre par les Béninois et le lieutenant Phillips ainsi que sept de ses hommes sont massacrés.
Les Britanniques lancent une expédition punitive. Une force de 1200 hommes, dirigée par l'amiral Harry Rawson, prend Benin City, détruit la majeure partie du trésor royal et disperse le restant. Les restes de centaines de sacrifices humains seront découverts par les Britanniques. Le Oba est forcé à l'exil vers Calabar, une lointaine ville du Nigeria. Dès 1897, la province du Warri est séparée du reste du royaume. La guerre aboutit à la fin de l'indépendance du royaume en 1900 où le Benin est incorporé dans l'empire colonial britannique à l'intérieur du protectorat du sud Nigeria.
La monarchie du Benin est rétablie en 1914, mais le Oba n'a plus de réel pouvoir.
La chute de l'empire du Benin est raconté en 1973 dans le film Ovonwamren Nogbaisi du réalisateur et scénariste Olawale Rotimila.
Ce qu'il reste
De nombreuses peuplades actuelles ont leurs origines dans le royaume du Benin : les Esans, les Ihohos, les Ikas... L'influence reste forte, même loin de ses bases : l'Itsekiri de
Warri, l'Igbo de
Onitsha et jusqu'au Kalabari Ijaw de Degema dans l'état de Rivers se réclament de la lignée royale Bini.
En 1975, l'ancien Dahomey est renommé Benin en souvenir.
Le Oba actuel, Solomon Erediauwa II, possède toujours, bien que ses fonctions ne soient pas officielles, une grande influence sur les peuplades des états nigérians actuels d'Edo et de Delta. Il a aboli les sacrifices humains, et conserve un rôle consultatif dans le gouvernement.
Une grande campagne a été lancée pour récupérer les pièces d'art distribuées dans les musées du monde entier après la prise de Benin City en 1897.